Retour sur le Ciné-danse perfo au Paraloeil
Par labaratteculturelle | Le 23/10/2015 | Thomas Fisson
Le 22 octobre, au cinéma Paralœil s’est tenue la soirée ciné-danse perfo. Introduits par une performance de la danseuse Soraïda Caron, trois films d’art de danse ont été projetés. Une courte histoire de la folie, réalisé par Isabelle Hayeur, Black and Tan Fantasy, de Mario Côté, et finalement, Glace, crevasse et dérive, de Katrine Gagné.
Une courte histoire de la folie - Bande-annonce from Isabelle Hayeur on Vimeo
Le numéro de danse présenté en guise d'introduction s’inscrit dans la veine post-moderne. Des costumes blancs, une musique techno qui fait place à la trame du Fabuleux destin d'Amélie Poulain à la moitié. La performance était néanmoins beaucoup plus hermétique dans son genre que celles des courts-métrages.
Le premier film, Une histoire courte de la folie, dresse un portrait des traitements par lesquels on s’occupait des gens atteints d'une déficience mentale via la danse : dans un premier temps, le film reconstitue le temps où on les enfermait ensemble dans des asiles, revêtus de jaquettes blanches, et où les plus violents venaient embêter les plus calmes. Puis, on passe dans les années 1920 où l’on procédait par hydrothérapie, procédé représenté par une performance entre un fou et un infirmier, où le premier tente d’échapper au dernier pour éviter la douche forcée. Dans la scène suivante, ce fut au tour des années 50 de passer par le filtre de la critique : les danseurs, en ligne, se mettent à bouger lentement sur place, par à-coups, comme profondément drogués. La partie la plus critique de ce court-métrage reste cependant le passage des années 1980, où la règle concernant ces gens est celle de la désinstitutionnalisation. Cette scène démontre le sort qui leur est réservé : livrés à eux-mêmes dans les rues de Montréal, incapables de se débrouiller; la rue, les interventions par des agents de police les traitant comme des squatteurs récidivistes, et donc de manière totalement inappropriée. Cette partie du film est en elle-même un pamphlet contre la politique de déresponsabilisation de la société à l’égard de ces laissés pour compte. Puis, le film se poursuit par le visionnement de danses représentant des démarches plus humaines : les intégrations en milieu familial et dans la société via le soutien de groupes d'accueil. Ce court-métrage sert très bien son propos via la danse, ce qui lui permet d’adoucir certaines scènes de violence en proposant une mise en scène symbolique.
Le deuxième film, Black and Tan Fantasy, reprend une performance des années 1960, sur une musique des années 30. D’un point de vue historique, ce court-métrage est très intéressant, car il offre une fenêtre sur les performances artistiques et leur réalisation du temps passé. Notons au passage l’emploi intelligent des cadres dans la mise en scène et la dualité entre la scène de danse moderne et celle couverte de tapisseries de style opéra cliché.
Enfin, le troisième film Glace, crevasse et dérive, nous offre une performance esthétique très travaillée. Une danse au sein de paysage hivernal d’un couple qui se rencontre, se fâche et se laisse après le passage à un équilibre instable de leur relation. La photographie de ce court-métrage filmé dans la forêt, sur la côte et sur des icebergs, est tout simplement magistrale. On ne peut que se laisser charmer par l'approche romantique de la chose (au sens littéraire du terme), la représentation des émotions étant inscrite jusque dans les conditions métrologiques du décor. Toutefois, on ne peut s’empêcher d’avoir une petite pensée pour les acteurs, très peu vêtus pour se protéger contre les rigueurs de l’hiver. Ce qu’il ne faut pas faire au nom de l’art…
Bref, la soirée au Paralœil a été un franc succès, permettant une initiation à ce genre peu couru et assez méconnu par la plupart des gens.
- Une chronique de Thomas Fisson
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